top of page

Science de la (deuxième) Naissance

 

Dans l'Islam, par la voie soufie, le plus grand des maîtres, Sheikh al-akbar Ibn Arabi déclare : "Nous sommes dans une vérité conditionnée, allons vers une Vérité totale, inconditionnelle !" "min al Haqq muqayada ila l Haqq al Moutlaq". En Inde, l'orientation spirituelle propose un chemin de libération totale des conditionnements humains, celle-ci est appelée Mukti ou Moksha. Ce qui nous conditionne c'est les voiles de l'ego (samskara shuddi ou « mémoires poisons ») constitués non seulement de nos propres erreurs de vie mais aussi de celles de nos ancêtres et plus encore d'un cycle de 5000 ans qui est le temps de marque sur notre enveloppe psychique d'une civilisation. La réalité des samskaras fait référence à des « schémas dysfonctionnels » trouvant leur origine non seulement dans les traumatismes de l'enfance et de la naissance mais aussi dans le précédant voyage de l’âme. La loi du karma est liée à ces samskaras. Chaque moment vécu inconsciemment crée des samskaras ou « empreintes karmiques » où la lumière de l'âme s'atténue. Certains sont comme une ligne tracée dans l'eau qui s'efface immédiatement. D'autres sont comme une ligne tracée sur le sable. Elles restent un certain temps jusqu'à ce que la marée arrive et les nettoie (par le dhikr par exemple). D'autres encore sont comme une ligne gravée dans la pierre. Ce sont ceux qui se répètent vie après vie attirant toujours des schémas similaires et amenant la misère. Ces samskaras sont la suie sombre dans une lampe claire qui empêche la lumière de notre âme de briller.

traces karma eau.jpeg
traces sables.jpeg
gravure roche.jpeg

Les différents types de karma qui peuvent être comme des traces sur l'eau, qui s'efface immédiatement, soit comme des traces sur le sable, qui s'efface avec l'action de grâce de l'Océan, soit comme taillé dans la pierre et qu'un long processus de purification peut adoucir avec le temps.

Les quatre phases de notre naissance​ portent les « mémoires poisons » (samskara shuddi) qui conditionnent notre vie ! En prendre conscience c’est se libérer ! Les grandes méthodes spirituelles comme celles de la voie soufie s’accordent sur l’importance du nettoyage des traces du passé telles les peurs, les abandons, les rejets, les humiliations, les fixations et les traumatismes familiaux. Le plus important d’entre eux est justement celui de la gestation dans le ventre de la mère, qui telle une graine karmique planté dans la matrice de la mère porte à l’état embryonnaire l’ensemble des conditionnements à libérer au cours de la vie. Sans ce nettoyage, même les ouvertures de conscience déjà réalisées sont instables.

spirale du voyage de l'âme.png

les mémoires karmiques de nos ancêtres, de notre civilisation et de notre précédant voyage de l'âme se réactualisent lors de notre naissance pour pouvoir s'en libérer et atteindre la béatitude.

C'est pourquoi il existe des méthodes comme "samskara shudi", la purification des « mémoires poisons », que l'on retrouve dans le processus de naissance qui nous libère de notre karma réactualisé pendant les 9 mois de gestation, décomposé en quatre matrices périnatales clés :

·      Phase 1 : le primal, le bébé vivant l'Unité, l’UN sans dualité dans le ventre de la mère.

·      Phase 2 : les contractions, le moment le plus difficile car le trauma d'abandon, de séparation qui est ici réactualisé en graine.

·     Phase 3 : le retournement dans le ventre de la mère, effort immense qui produit le trauma du héros (on lit très tôt à cause de cela des histoires de héros).

·     Phase 4 : l'accueil de la mère qui est le grand retour à la joie.

Ceci représente aussi le chemin de l'éveil spirituel qui est une deuxième naissance.

Mais comment prendre conscience des phases de gestation vécues dans le ventre de la mère qui sont enfouies dans notre inconscient ? En particulier certains traumas liés au père peuvent bloquer toute réussite financière et certains traumas liés à la mère produisent des quantités d’obstacles sur le chemin de vie. Comment finalement percevoir les correspondances harmoniques de ces 4 phases de la naissance avec celles du mûrissement qui conduit à l’Eveil ? Notre cerveau conscient est capable de 2000 connections secondes mais notre inconscient tourne à 4 milliards de connections secondes, comment réaliser cet alignement ?

Ceci grâce à la respiration consciente holotropique (qui signifie littéralement "orienté vers la Plénitude, le Tout" qui est aussi l'Un) lors du processus de naissance au cours de laquelle une énergie de grâce est invoquée : le deeksha transmis par les Maitres de l’Inde, en lien avec la science des descentes de grâces, ‘ilm an-Nuzûl de l’Imam al Mahdi (voir article n°2).

La respiration consciente (holotropique) est une pompe entre l’inconscient et le conscient, enfin certaines musiques choisies vont résonner en correspondance avec les phases harmoniques de la gestation nous conduisant jusqu'au cœur de nos cellules pour nettoyer les « mémoires poisons » et lever les blocages liés à notre naissance. Une musique soigneusement sélectionnée remplit plusieurs fonctions importantes dans les états de conscience holotropiques. Elle agite les croûtes associées aux souvenirs refoulées, les fait remonter à la surface et facilite leur expression. Elle aide à ouvrir la porte de l'inconscient, intensifie et approfondit le processus de guérison et fournit un contexte significatif pour l'expérience.

Breath-Hu-from-the-source-of-Hu-229x300.jpeg

La respiration consciente holotropique, "orienté vers le Tout (al-Kull), l'Univers (vers al-Wâhid)", se connecte à l'Origine

En Inde, le terme prana signifie énergie mais aussi l'essence sacrée de la vie qui prend support dans l’air. De même, dans la médecine traditionnelle chinoise, le mot chi fait référence à l'énergie de la vie, ainsi qu'à l'air naturel que nous respirons dans nos poumons, et qui est le support naturel du chi. En arabe, le mot Rûh, Esprit, signifie également le souffle vital ou la respiration, et le « repos libérateur dans la Paix » peut aussi être traduit par Rawh de la même racine que Rûh : Le repos intérieur s’atteint via la respiration harmonisée par l’esprit. Le mot nafas, souffle ou expire, signifie également l’âme ou le soi suivant les cas ; cet autre mot de la langue sacrée arabe met encore en évidence le lien entre la respiration et l’harmonisation des éléments subtils de l’être car à l’origine, Nafas ar-Rahmân (le Souffle du Tout miséricordieux) produit la Manifestation selon une chaîne de l’Existence harmoniquement hiérarchisée.

Cet enseignement comme une expérience reçue non seulement des proches de Sanislas Grof mais aussi de « première main » de ces traditions de l’Inde et de la voie soufie. Cette expérience nous éveille à la conscience de tous ces conditionnements cachés afin de nous en libérer. Le processus de la naissance que nous avons entamé en naissant physiquement est en effet appelé à continuer dans le mûrissement de l’âme et de l’esprit, dans cette présence de la Grâce, comme dans le ventre de la Mère Universelle, cette Rahma des soufis, qui nous conduit à la deuxième naissance que l’on appelle EVEIL, le Fath Rabbani.

Dans l'Islam et dans la bible ceci relève de la sagesse de Jonas qui apprend à sortir du ventre de la baleine pour une deuxième naissance. Cette pratique n'est pas une théorie c'est une expérience profonde guidée par la grâce. Celle qui conduit in fine à l'Éveil en tant que deuxième naissance.

La science de la naissance selon la sagesse de Jonas dans les fusus al-hikam

Rappelons que les fusus al-hikam, le livre des chatons de Sagesse, fût donné par le Prophète Mohammad (Paix et grâces unifiantes sur lui) à Sheikh al-akbar Ibn ’arabi afin que les gens da la fin du Cycle puisse en tirer bénéfice dans une réconciliation universelle des différentes sagesses du monde dans l’arche salvatrice de l’Islam. La sagesse de Jonas dans les Fusus al-hikam est appelé nafassiya selon une prononciation spécifique, c’est-à-dire la « sagesse de la Respiration ou du Souffle » donc en rapport avec la circulation du souffle interne.

Ibn ‘arabi nous en parle dans le chapitre 33 des futuhât al-makkiyya dont voici un extrait :

« La colère, c’est l’obscurcissement du cœur qui, en raison même de la dignité élevée de Jonas transparut à l’extérieur. C’est pourquoi, il fut placé dans le ventre obscur du poisson, tout le temps qu’Allah voulut. Allah attira son attention sur la condition qui avait été la sienne alors qu’il n’était qu’un fœtus dans le ventre de sa mère : qui le menait à sa guise lorsqu’il s’y trouvait ? Pouvait-on imager alors de sa part qu’il se mette en colère ? Ou que l’on se mette en colère contre lui ? Bien au contraire, il se trouvait dans le sein protecteur d’Allah et ne connaissait que son Seigneur. Celui-ci le renvoya à une condition (analogue) dans le ventre du poisson, lui donnant ainsi un enseignement non en parole mais en acte…Il implora dans les ténèbres : « La ilâha illa anta subhanak inny kuntu min ad-zâlimîn. Pas de Dieu si ce n’est Toi … Gloire à Ta Transcendance ! En vérité, j’ai été, moi d’entre les injustes (zâlîmîn), mot de la même racine que « ténèbres » (zulumât) ; c’est-à-dire mon propre obscurcissement (i.e les mémoires poisons samskaras shuddi) est retombé sur moi ! Ce n’est pas Toi qui m’a placé dans les ténèbres. C’est plutôt ce qui était à l’intérieur de moi qui a transparu extérieurement (mon karma réactualisé dans le ventre de la Mère), tandis que la lumière s’est transporté à l’intérieur de moi… Son intérieur s’illumina alors ; l’obscurcissement de la colère disparut : la lumière du Tawhîd se répandit en lui ; la miséricorde se déploya de telle sorte que cette lumière transparut extérieurement comme l’avait fait auparavant l’obscurité due à la colère…Jonas sortit (du ventre du poisson) aussi faible qu’un petit enfant » (c’est la deuxième naissance).

jonas sort de la baleine.jpeg

Jonas-Younes qui sort, de la Baleine, à l'état primordial

C’est aussi dans cette même optique que René Guénon, Sheikh Abdel Wahid Yahya, assimile le ventre de la Baleine à la caverne initiatique, lieu de la deuxième naissance pour Jonas (aussi connu sous le nom de Dhun-nûn, le détenteur du nûn-ن) :

« Si maintenant nous comparons l’histoire de Jonas… Jonas demeure enfermé dans le corps de la baleine … pendant une période qui est aussi pour lui…une période d’«obscuration», correspondant à l’intervalle entre deux états ou deux modalités d’existence... On sait d’ailleurs que la sortie de Jonas du sein de la baleine a toujours été regardée comme un symbole de résurrection, donc de passage à un nouvel état ; et ceci doit être rapproché, d’autre part, du sens de « naissance » qui, dans la Kabbale hébraïque surtout, s’attache à la lettre nûn, et qu’il faut entendre spirituellement comme une « nouvelle naissance », c’est-à-dire une régénération de l’être individuel ou cosmique.

C’est ce qu’indique très nettement la forme de la lettre arabe nûn : cette lettre est constituée par la moitié inférieure d’une circonférence, et par un point qui est le centre de cette même circonférence… Le développement du germe spirituel implique que l’être sort de son état individuel, et du milieu cosmique qui en est le domaine propre, de même que c’est en sortant du corps de la baleine que Jonas est « ressuscité » ; …on comprendra sans peine que cette sortie est encore la même chose que celle de la caverne initiatique, dont la concavité même est aussi représentée par celle de la demi-circonférence du nûn. La « nouvelle naissance » suppose nécessairement la mort à l’ancien état, qu’il s’agisse d’un individu ou d’un monde ; mort et naissance ou résurrection, ce sont là deux aspects inséparables l’un de l’autre, car ce ne sont en réalité que les deux faces opposées d’un même changement d’état… Il convient de dire que le symbolisme de la baleine n’a pas seulement un aspect «bénéfique», mais aussi un aspect «maléfique», ce qui, outre les considérations d’ordre général sur le double sens des symboles, se justifie encore plus spécialement par sa connexion avec les deux formes de la mort et de la résurrection sous lesquelles apparaît tout changement d’état suivant qu’on l’envisage d’un coté ou de l’autre, c’est-à-dire par rapport à l’état antécédent ou à l’état conséquent. La caverne est à la fois un lieu de sépulture et un lieu de « renaissance », et, dans l’histoire de Jonas, la baleine joue précisément ce double rôle…, dans la tradition arabe, par les « filles de la baleine » (benât el-Hût), qui au point de vue astrologique, équivalent à Râhu et Kêtu dans la tradition hindoue... » ( Les mystères de la lettre nûn, R. Guénon). Kêtu, ou le nœud sud lunaire, est précisément en rapport avec le Karma dont la caverne initiatique doit transmuter les effets.

Ces quelques points montrent comment dans l’arche de l’Islam, s’inscrivent des méthodes pratiques de progrès spirituel grâce au recours providentiel des œuvres inspirés de René Guénon, Sheikh Abdel Wahid Yahya et Sheikh al-akbar Muhyuddîn Ibn ‘arabi.

bottom of page